Panorama des principales mesures du projet de Loi de Finances pour 2020
Published on 2nd Oct 2019
Le projet de loi de finances pour 2020 a été dévoilé par le Gouvernement. Les principales mesures sont décrites ci-dessous.
Impôt sur les sociétés
Trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés
La loi de finances pour 2018 a engagé un mouvement de baisse du taux normal de l’IS qui est ramené à :
- 28 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020 ;
- 26,5 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2021 ;
- 25 % à compter du 1er janvier 2022.
Pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 250 M€, le taux d’IS est ramené à :
- 28 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020 ;
- 26,5 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2021 ;
- 25 % à compter du 1er janvier 2022.
Pour les grandes entreprises dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 250 M€
- au titre des exercices ouverts du 1er janvier au 31 décembre 2020, ces entreprises paieront l’impôt sur les sociétés au taux de 28 % jusqu'à 500 000 € de bénéfice. Au-delà, le taux normal de 31 % s’appliquera.
- au titre des exercices ouverts du 1er janvier au 31 décembre 2021, c’est le taux de 27,5 % (et non pas 26,5 %) auquel il sera recouru pour l’ensemble de leur bénéfice imposable.
Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2022, le taux normal de l'impôt sur les sociétés sera abaissé à 25 % pour l’ensemble des entreprises.
Réduction des niches fiscales sur les entreprises
Réduction d’impôt en faveur du mécénat pour les grandes entreprises
Le bénéfice des mesures du mécénat étant fortement concentré sur les très grandes entreprises, il est prévu de baisser de 60 % à 40 % le taux de la réduction d’impôt pour les versements supérieurs à 2 M€.
Toutefois, les versements effectués au profit d'organismes sans but lucratif qui procèdent à la fourniture gratuite de repas à des personnes en difficulté, qui contribuent à favoriser leur logement ou qui fournissent gratuitement certains soins à des personnes en difficulté, demeureront éligibles à une réduction d’impôt au taux de 60 %, quel que soit son montant.
Ajustement du Crédit d’impôt recherche (CIR)
Il est prévu de baisser le taux utilisé pour le calcul des frais de fonctionnement rentrant dans la base du CIR.
Ces frais sont actuellement estimés, de façon forfaitaire, à 50 % des frais de personnel de recherche auxquels s’ajoutent 75 % des dotations aux amortissements.
Il est prévu d’ajuster le taux de prise en compte des frais de personnel de 50 % à 43 %, au plus près des charges de fonctionnement réellement supportées par les entreprises. La part des frais de fonctionnement basée sur les amortissements restera inchangée, ce qui permettra la prise en compte de la situation des secteurs industriels qui connaissent, par rapport aux secteurs des services, des frais de fonctionnement plus significatifs liés à l’importance de leurs installations scientifiques.
Taxe sur la Valeur Ajoutée
Lutte contre la fraude à la TVA sur Internet
Obligation des plateformes en ligne en matière de TVA
Afin de lutter contre la fraude à la TVA sur les ventes à distance facilitées par l’utilisation d’une interface électronique et de réduire la charge administrative pour les vendeurs, l’administration fiscale et les consommateurs, il est prévu que les plateformes en ligne soient redevables de la TVA due sur les ventes qu’elles facilitent, dès lors que le vendeur est établi dans un pays tiers.
La mesure, plus ambitieuse que les futures obligations européennes, couvre d’une part l’ensemble des importations directes par le consommateur et, d’autre part, l’ensemble des livraisons intracommunautaires de biens préalablement importés, lesquels sont souvent prépositionnés dans des entrepôts logistiques avant leur livraison au consommateur final.
Les opérateurs de plateforme devront en outre conserver pendant 10 ans un registre permettant aux États membres où ces opérations sont imposables de vérifier que la TVA a été correctement acquittée.
Création d’une liste des opérateurs de plateforme non-coopératifs
Le PLF propose de permettre la publication sur Internet de la liste des opérateurs de plateforme considérés comme non-coopératifs car ne respectant pas, de manière réitérée, leurs obligations fiscales sur le territoire français, y compris en tant que tiers déclarants.
Cette mesure, qui s’inscrit dans la logique des sanctions réputationnelles (name and shame) de la loi relative à la lutte contre la fraude du 23 octobre 2018, poursuit un double objectif :
- s’assurer de la pleine coopération fiscale des opérateurs de plateforme ;
- informer les citoyens sur l’identité des plateformes les moins respectueuses de leurs obligations fiscales, dans un but de transparence et d’amélioration de la concurrence dans le secteur numérique.
Traçabilité des colis transitant par des entrepôts logistiques
Le modèle économique du commerce électronique, qui met en relation les consommateurs européens avec des opérateurs économiques du monde entier, repose sur l'existence d'un maillage du territoire, au travers d'entrepôts et plateforme logistiques, permettant la livraison rapide de biens préalablement importés. La lutte contre la fraude à la TVA en matière de e-commerce passe donc par une meilleure traçabilité des flux physiques.
Le PLF prévoit d’instituer au profit de l'administration un droit de communication exercé directement auprès des entrepôts et des plateformes logistiques, permettant de retracer les flux de biens importés et d'identifier clairement le redevable de la TVA.
Cette réforme doit permettre de mieux lutter contre la concurrence déloyale de vendeurs localisés hors de l’Union européenne qui n’acquittent pas la TVA et bénéficient ainsi d’un avantage sur leurs concurrents respectueux de leurs obligations fiscales.
Lutte contre la fraude et contrôles fiscaux
Lutte contre l’optimisation fiscale agressive
Lutte contre les dispositifs fiscaux dits «hybrides»
Le PLF transpose les dispositions de la directive dite «ATAD», qui s’inscrivent dans le cadre des travaux de l’OCDE sur la lutte contre l’érosion fiscale (BEPS) et visent à mettre un terme à certaines pratiques d’optimisation d’entreprises multinationales limitant l’imposition de leurs bénéfices au moyen de dispositifs dits «hybrides».
Les dispositifs «hybrides» sont la conséquence de différences entre États dans la qualification juridique des instruments financiers, des entités ou dans les règles d’attribution des paiements. Ces dispositifs se traduisent soit par une déduction dans un État sans imposition corrélative dans l’autre État, soit par une déduction dans chacun des deux États, soit encore par une absence d’imposition dans les deux États.
Afin de lutter contre l’optimisation fiscale pouvant résulter de ces situations, la mesure proposée permet à l’État, en fonction de la nature du dispositif «hybride» soit de refuser la déduction de la charge, soit d’inclure le paiement dans le bénéfice imposable.
Domiciliation fiscale des dirigeants des grandes entreprises françaises
Le PLF clarifie les règles de domiciliation fiscale des dirigeants des grandes entreprises françaises. Dans un contexte où l’exercice de fonctions de dirigeant au sein de grandes entreprises est fortement internationalisé et où les outils modernes de travail réduisent l’importance du lieu d’exercice matériel de l’activité, cette disposition établit, en cohérence avec la jurisprudence administrative, un lien clair en droit interne entre les fonctions de dirigeant des grandes entreprises françaises et la domiciliation fiscale en France.
Cette mesure s’appliquera à compter de l’imposition des revenus de l’année 2019.
Modernisation des procédures et des outils
Facturation électronique dans les relations interentreprises
La généralisation progressive de la facturation électronique, déjà effective pour les marchés publics, poursuit plusieurs objectifs au bénéfice des entreprises et de l'administration :
- la simplification de la vie des entreprises, avec la diminution du traitement papier et la possibilité d’un pré-remplissage des déclarations de TVA ;
- la sécurisation des relations commerciales entre les entreprises ;
- le renforcement de la lutte contre la fraude en matière de TVA au moyen de recoupements automatisés entre factures émises et factures reçues.
Le PLF prévoit la remise en septembre 2020 d'un rapport permettant au Gouvernement et au Parlement d'éclairer leur décision quant aux modalités et au calendrier de mise en oeuvre de la facturation électronique à compter de 2023.
Exploitation des données ouvertes des réseaux sociaux
Pour améliorer la détection de la fraude et le ciblage des contrôles, l’administration s’appuie de plus en plus sur l’exploitation des données par des techniques innovantes de "datamining", qui ont d’ores et déjà prouvé leur intérêt. Ces traitements sont aujourd’hui limités aux données déclarées à l’administration et ne s’étendent pas aux données ouvertes, notamment celles des réseaux sociaux. Celles-ci pourraient pourtant permettre, par exemple, d’établir l’existence d’une activité non déclarée sur Internet, ou constituer un indice de résidence fiscale.
Bien qu’il s’agisse de données librement publiées par les utilisateurs, leur exploitation implique un traitement de données à caractère personnel qu’il est proposé d’encadrer par une disposition spécifique, assortie de garanties, et limitée à la recherche des manquements les plus graves.
Cette possibilité serait ouverte à titre expérimental, pour une durée de trois ans.
Fiscalité des personnes physiques
Baisse de l’impôt sur le revenu des classes moyennes et populaires
Le PLF prévoit une baisse inédite de 5 Md€ de l’impôt sur le revenu (IR), conduisant à alléger substantiellement l’effort fiscal des classes moyennes et populaires.
- La première tranche imposable sera abaissée de 14 % à 11 % ;
- Le reste du barème sera ajusté afin de concentrer les gains de cette mesure sur les redevables de l’IR les plus modestes ;
- Les ménages relevant des tranches les plus élevées du barème (taux de 41 % et 45 %) ne seront pas concernés par la baisse d’impôt.
Le mécanisme de la décote, qui permet de réduire voire d’annuler l’impôt des foyers faiblement imposés, est en outre renforcé afin de mieux lisser l’entrée dans l’impôt des ménages dans la première tranche de revenus.
Grâce au prélèvement à la source, elle se traduira par un allégement d’impôt pour tous les Français concernés dès janvier 2020.
Cette réforme du barème de l'impôt sur le revenu s'appliquera à compter de l’imposition des revenus de l’année 2020.
Suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale
Le PLF prévoit la suppression totale et définitive de la taxe d’habitation sur les résidences principales.
- Pour 80 % des foyers fiscaux, la taxe d’habitation sera définitivement supprimée en 2020, après avoir été allégée de 30 % en 2018 puis de 65 % en 2019.
- Pour les 20 % des ménages restants, l’allègement sera de 30 % en 2021, puis de 65 % en 2022.
En 2023, plus aucun foyer ne paiera de taxe d’habitation sur sa résidence principale : la réforme bénéficiera au total à 24,4 millions de foyers pour un gain moyen de 723€.
Simplification de la déclaration de l’impôt sur le revenu
Pour de nombreux Français, la déclaration pré-remplie de revenus mise à disposition chaque année par l’administration fiscale ne nécessite ni compléments ni rectifications. C’est notamment le cas des foyers fiscaux dont les revenus sont intégralement transmis à la DGFiP par des tiers (employeurs, caisses de retraite, etc.).
La mise en œuvre du prélèvement à la source depuis le 1er janvier 2019 a permis de systématiser et fiabiliser cette transmission d’informations. Cependant, les contribuables ont toujours l’obligation de souscrire et de transmettre leur déclaration de revenus, en ligne ou au format papier.
À partir de 2020, les foyers fiscaux répondant à certains critères (environ 12 millions), pourront remplir cette obligation de manière tacite.
- Dès lors qu’ils n’ont rien à modifier ou à ajouter aux informations dont dispose l’administration fiscale, ils n’auront plus aucune démarche à effectuer. Dans ce cas, leur impôt sur le revenu et leurs prélèvements sociaux seront calculés sur la base de ces seules informations.
- Dans le cas contraire, ils pourront procéder à une déclaration classique pour signaler à l’administration fiscale les informations à corriger ou à compléter.
Pour les contribuables inconnus de l’administration ou pour ceux dont la situation rend très probable que l’administration ne dispose pas de données exactes et exhaustives (par ex. les travailleurs indépendants, les titulaires de revenus fonciers, etc.) l’obligation déclarative perdure.
Divers
Suppression de taxes à faible rendement
Les taxes à faible rendement complexifient le droit fiscal, impliquent des formalités administratives supplémentaires et nuisent à la compétitivité des entreprises. De plus, elles peuvent générer des coûts importants pour les services chargés de leur recouvrement et de leur contrôle.
Après la suppression de 26 taxes par la loi de finances pour 2019, 18 suppressions sont prévues dès le texte initial du PLF.
Compte tenu des suppressions déjà votées dans la Loi de Finances pour 2019, près de 600 M€ de petites taxes auront ainsi été supprimées entre 2019 et 2021.
Répartition de la taxe pour frais de chambres de commerce et d’industrie (TCCI)
Dans le cadre de la réforme du réseau des chambres de commerce et d’industrie (CCI) prévue par la loi PACTE, le ministre de l’Économie et des Finances a annoncé une baisse progressive de l’ordre de 400 M€ sur quatre ans du produit de la taxe pour frais de chambres de commerce et d’industrie (TCCI).
Le PLF prévoit que l’établissement CCI France devienne le seul affectataire de la TCCI, ce qui permettra à cet organisme d’exercer une réelle fonction de coordination et de pilotage du réseau des CCI et d’assurer une meilleure répartition du produit de la taxe entre les CCI de région, au plus près des besoins des territoires et des entreprises, en tenant compte des particularités locales.
Ces nouvelles dispositions constituent une mesure de simplification structurante, se traduisant par la suppression d’un dispositif complexe et peu lisible de répartition de la TCCI, et par un allègement des prélèvements sur les entreprises.
Développement du commerce de proximité en zone rurale et dans les centres villes des villes moyennes
Le PLF prévoit de donner la possibilité aux collectivités territoriales d’instaurer une exonération de cotisation foncière des entreprises, de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au profit des petites activités commerciales (entreprises de moins de 11 salariés et de moins de 2 millions de chiffre d’affaires annuel) :
- dans les territoires ruraux (petites communes ayant encore moins de dix commerces et non intégrées à une aire urbaine) ;
- dans les zones d’intervention des communes ayant signé une convention ORT et dont le revenu médian par unité de consommation est inférieur à la médiane nationale.
Ces deux dispositifs de soutien en faveur du commerce de proximité pourront s’appliquer à compter du 1er janvier 2020.
Unification du recouvrement social et fiscal
En matière fiscale
Il est prévu de confier à la DGFiP le recouvrement de taxes actuellement prises en charge par la direction générale des douanes et droits indirects. À terme, les contribuables pourront s’adresser à une seule et même administration pour le paiement de leurs impôts.
- Le PLF définit un calendrier échelonné de 2021 à 2024 pour le transfert du recouvrement des taxes suivantes : la taxe spéciale sur les véhicules routiers, les impositions affectées au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), le droit annuel de francisation, le droit de passeport sur les navires, les taxes intérieures de consommation sur les énergies dites de réseau (gaz naturel, charbon, électricité), le recouvrement des amendes douanières et les accises sur les tabacs et les alcools.
- L’unification du guichet de déclaration, de paiement et de déduction de la TVA pour les entreprises est également achevée par le PLF, qui fixe à 2022 son extension à la TVA à l’importation, laquelle sera désormais déclarée et acquittée auprès des services de la DGFiP. Le but est d’alléger les charges administratives qui pèsent sur les entreprises et d’améliorer l’efficacité des administrations par la centralisation du recouvrement de la TVA.
En matière sociale
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 poursuit la même démarche de rationalisation du recouvrement au sein de la sphère sociale.
- L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale et le réseau des URSSAF voient s’élargir leurs compétences en matière de recouvrement des cotisations d’assurance vieillesse obligatoire.
- La mise en place d’un interlocuteur unique en matière de recouvrement social permettra de simplifier les échanges afin que les employeurs disposent des informations utiles pour l’accomplissement de leurs démarches sociales.
- Enfin, dans le contexte de mise en œuvre du "droit à l’erreur", il est prévu d’enrichir la Déclaration sociale nominative (DSN) dans le but de faciliter la détection des erreurs susceptibles d’être commises dans les déclarations.